L’accès aux soins est un droit pour tous, cependant certaines catégories de personnes font face à des difficultés pour accéder aux services de santé. C’est le cas des personnes sourdes ou malentendantes. Afin d’aider ces personnes au mieux dans leur parcours de santé, INFOSENS a donc réalisé une enquête en deux volets pour mieux cerner les difficultés auxquelles peuvent faire face ces personnes et ainsi mieux y pallier.
Premier volet : enquête auprès du personnel médical
Sur l’ensemble des répondants, 72% confirment avoir déjà accueilli un patient sourd ou malentendant. Cependant, ces patients ne sont systématiquement accompagnés par un proche que dans 22% des cas au plus (avec les médecins). La plupart du temps, les professionnels de santé doivent donc fournir un effort personnel pour s’assurer d’être bien compris par leur patient.
Malgré le fait que les professionnels ont de ce fait besoin de connaître les outils à leur disposition pour faciliter la communication avec une personne sourde ou malentendante, les trois-quarts d’entre eux ne sont en fait pas formés sur les questions de surdité, avec des disparités importantes entre catégories professionnels : ainsi, les cadres de santé sont environ 37% à être sensibilisés, soit plus du double des aides-soignants (16%). Pourtant, une grande majorité (83%) de ces mêmes professionnels souhaitent être sensibilisés sur ce sujet, démontrant la conscience qu’ils ont des difficultés que ces lacunes engendrent, tant pour eux que pour leurs patients.
Ce manque de sensibilisation se ressent dans les pratiques, en particulier des médecins. Ainsi par exemple, on constate que plus de 40% des professionnels enlèvent leur masque, ce qui facilite la lecture labiale pour le patient (bien qu’un dispositif transparent soit mieux en termes d’hygiène). En effet, presque un tiers d’entre eux n’utilisent jamais l’écrit lors de leurs consultations, alors que les patients sourds ou malentendants en ont d’autant plus besoin qu’ils peuvent avoir des difficultés à comprendre le message lorsque celui-ci est transmis à l’oral. Par ailleurs, un quart des médecins permettent une prise de rendez-vous uniquement par téléphone, qui est un moyen souvent difficile à utiliser pour les personnes sourdes.
Les Unités d’Accueil et de Soins aux Sourds sont par ailleurs relativement peu connues des professionnels, et les services et associations qui proposent des outils afin de faciliter la communication avec les personnes ou malentendantes le sont encore moins.
Deuxième volet : enquête auprès des patients
Cette seconde partie du projet d’INFOSENS sur l’accès aux soins rappelle, pour commencer, que la surdité n’est pas une expérience unique : les patients n’ont pas tous le(s) même(s) mode(s) de communication et cela se ressent, par exemple dans leur moyen de prise de rendez-vous privilégié, ou dans leur manière de communiquer avec les professionnels de santé.
Il reste cependant qu’environ 84% des patients qui ont répondu à notre enquête confirment avoir des difficultés occasionnelles ou systématiques dans leur communication avec leur médecin et que près de 70% ont ‘toujours’ des difficultés pour comprendre ce qui est écrit sur leurs ordonnances, sachant qu’ils n’ont de fait pas forcément compris ce que le professionnel peut leur avoir dit à l’oral.
Ces difficultés ont un impact très concret – et surtout négatif – sur l’accès aux soins des personnes sourdes ou malentendantes. Ainsi, 21% des répondants de notre enquête ont déjà renoncé à des soins médicaux. Chez ceux qui ont des difficultés systématiques pour comprendre et communiquer avec leur médecin, cette proportion monte à 31%. Parmi les motifs précis cités par une partie des répondants pour expliquer ces renoncements, on retrouve d’ailleurs la difficulté de prendre rendez-vous au téléphone ainsi qu’une communication difficile ou la peur de celle-ci, bien que d’autres facteurs jouent également un rôle (la difficulté de trouver des interprètes, par exemple).
De plus, 14% des personnes interrogées ont également confirmé avoir fait face à un refus de soins spécifiquement dû à leur surdité. Chez ceux qui pratiquent la Langue des Signes Française, cette proportion double.
En conclusion, INFOSENS a posé une question plus libre aux répondants en leur demandant ce qui pourrait à leur avis permettre une amélioration de leur accès aux soins. La demande qui revient dans un quart des réponses est, en accord avec le premier volet de notre enquête, le désir que les professionnels soient mieux informés et sensibilisés sur le sujet de la surdité, afin qu’ils s’adaptent mieux aux besoins des patients sourds ou malentendants. D’autres suggestions concernent également la diversification des modalités de prise de rendez-vous, ainsi que la prise en main par les professionnels de santé d’outils qui puissent permettre une meilleure communication entre eux et leurs patients (écrit, application de transcription instantanée…).
[1] Légifrance, Article L1110-3 du Code de la Santé Publique.